Résumé des interventions

Présentation du projet PREMILA : Prématurés et Interactions Langagières

Tiphanie Bertin, MCF Sciences du Langage, Université Sorbonne-Nouvelle Paris 3, et équipe du projet

 Résumé :

Les interactions parents-enfant dès la naissance sont primordiales pour l’évolution future de l’enfant, notamment au niveau langagier (Bruner, 1983, 1987 ; Meltzoff, Moore, 1977 ; Stern, 1977, 2005 ; Tomasello, 2003 ; Trevarthen, 1979, 2003). Or une naissance prématurée et l’hospitalisation de l’enfant peuvent altérer la mise en place de ces interactions entre les parents et leur bébé prématuré. Le projet PREMILA – Prématurés et Interactions Langagières – a pour objectif d’étudier les liens entre les interactions langagières précoces entre parents et bébé prématuré et la communication et le développement  langagier ultérieur de l’enfant. Le rôle du positionnement des parents au cœur des soins quotidiens de leur bébé hospitalisé a été mis en évidence dans l’amélioration du pronostic médical et développemental des enfants et dans les compétences des parents dans le cadre des études des effets du programme NIDCAP (Als et al., 1986 ; Als et al., 2003). Notre hypothèse est que la mise en place d’interactions langagières précoces entre les parents et leur nouveau-né prématuré constitue un facteur facilitant, et donc un soutien, pour le développement communicatif et donc langagier de ces enfants « à risque » permettant une compensation plus rapide du décalage développemental qu’ils peuvent présenter par rapport aux enfants nés à terme. D’autant plus qu’il a été observé que malgré leur condition, ces enfants montrent des compétences de communication précoce (Tremblay-Levau et al. , 1999). Cet exposé sera l’occasion pour nous de présenter notre protocole de recueil de données qui consiste en l’observation longitudinale d’une dizaine de dyades mère-enfant de l’âge de 3 mois corrigé à 24 mois corrigé, avec tous les trois mois une passation du protocole ECSP (Evaluation de la Communication Sociale Précoce, Guidetti, Tourette, 2009) et un questionnaire IFDC (Inventaire Français du Développement Communicatif, Kern, 2005), assorti d’un questionnaire de départ sur la communication parents-enfants lors de son hospitalisation. Nous présenterons également nos premières pistes d’analyses des premières données recueillies.

 

Quelles expériences langagières pour le bébé né prématuré ?

Karine Martel, MCF Psychologie du développement, INSHEA, Suresnes 

Maya Gratier, PR Psychologie du développement, Université Paris 10- Nanterre

Résumé : 

Dans la première partie de notre exposé nous présenterons quelques travaux de recherche sur les effets de la voix humaine sur le nouveau-né prématuré, menés en unité de soins intensifs néonataux. Ces travaux convergent pour suggérer que l'expérience de la voix humaine, en particulier lorsqu'elle est adressée au bébé, influence le bien-être du bébé et son développement langagier. Nous nous demanderons ensuite quelles caractéristiques spécifiques d'un langage, adressé ou non, au bébé pourraient être en jeu dans le développement d'une capacité langagière. On sait que le fœtus apprend in utero à reconnaître les sons de la langue qu'il parlera et se familiarise en même temps avec les qualités particulières de la voix de sa mère. Faut-il alors envisager d'introduire dans les USIN un bain de langage ou un bain de vocalité maternelle pour favoriser le développement langagier du bébé prématuré ? Dans la seconde partie de notre exposé à deux voix, nous proposerons que la prosodie constitue pour le bébé né prématuré ou à terme une voie d'entrée fondamentale dans la pratique langagière et par là dans les formes de pensées qui y sont associées.

 

Les habiletés langagières des enfants grands prématurés à l’âge préscolaire

Lise Desmottes, logopède-chercheur, CHR de la Citadelle, Liège ; Université de Liège et de Louvain

Résumé :

Les enfants nés prématurément sont plus à risque de présenter des difficultés au niveau langagier, cognitif et moteur que les enfants nés à terme. Ces difficultés peuvent avoir un impact négatif sur la qualité de vie de ces enfants et se répercuter sur les apprentissages scolaires. Les préciser et en comprendre les mécanismes s’avère d’autant plus important que le nombre d’enfants nés prématurément augmente depuis plusieurs décennies. Au cours de cette présentation, nous tenterons de mieux caractériser les habiletés langagières des enfants grands prématurés à 5 ans en apportant des éléments de réponse à ces questions : certaines compétences langagières sont-elles plus altérées que d’autres ? Les difficultés langagières se résorbent-elles avec le temps ? Quel est l’impact des compétences phonologiques précoces sur l’apprentissage du langage écrit ultérieur ? 

 

Guidance parentale orthophonique : application possible aux enfants prématurés

Marie-Laure Charkaluk, Pédiatre néonatalogiste,  Hôpital Saint Vincent de Paul, Lille

Résumé :

Les enfants nés prématurés sont à risque de troubles ultérieurs du neurodéveloppement. Parmi ceux-ci, on trouve l’altération des performances cognitives mais aussi d’autres troubles comme les troubles du comportement, les troubles de la motricité fine, l’altération des fonctions exécutives et les difficultés langagières. Une méta-analyse incluant des enfants de 5 à 12 ans nés grands prématurés et/ou avec un petit poids de naissance indique qu’ils présentent des performances inférieures à celles des enfants nés à terme dans tous les domaines du langage expressif et réceptif, avec une différence de l’ordre de 0,4 à 0,8 DS. Ces difficultés de langage peuvent être repérées très tôt dans la vie. Entre 2 ans et 4 ans, de faibles performances du langage sont observées chez 24 à 34% des enfants grands prématurés.

Sur le plan physiopathologique, on peut montrer que les grands prématurés doivent affronter une vulnérabilité à la fois biologique, rendue évidente par la mise en évidence en imagerie des anomalies de la substance blanche cérébrale, mais aussi un environnement socialement désavantagé plus fréquemment retrouvé que chez les enfants nés à terme, et enfin les effets psychologiques de cette naissance prématurée pour leurs parents avec leurs conséquences sur la relation parent-enfant. Par exemple, l’étayage verbal maternel est moindre chez les mères d’enfants prématurés par rapport aux mères d’enfants nés à terme.

En population générale, un faible vocabulaire expressif entre 2 et 3 ans est retrouvé chez 15 à 20 % des enfants. Une revue de la littérature conclut que les prises en charge orthophoniques menées chez les enfants d’âge préscolaire présentant un retard de langage permettent une amélioration à court terme dans différents domaines du langage en comparaison avec un groupe contrôle. A ces jeunes âges, une modalité particulière de prise en charge orthophonique est la guidance parentale orthophonique. Un intervenant formé, le plus souvent un orthophoniste, apprend aux parents à utiliser des stratégies de langage spécifique avec leurs enfants. Certaines prises en charge sont réalisées en groupes de parents, tandis que d’autres sont adaptées à une prise en charge individuelle. L’efficacité des prises en charge par guidance parentale orthophonique a fait l’objet d’une méta-analyse qui confirme qu’elles ont un effet positif, significatif sur les performances langagières de l’enfant avec et sans déficience intellectuelle.

Les enfants grands prématurés semblent constituer un public idéal pour ce type de prise en charge en raison de la fréquence de leurs faibles performances de langage et des difficultés associées possible dans l’étayage verbal et/ou la relation parents-enfant. L’essai clinique EPILANG a inclus des enfants nés avant 32 semaines d’aménorrhée et présentant un faible vocabulaire expressif suspecté à 24 mois d’âge corrigé, et confirmé à 30 mois d’âge corrigé. Les enfants étaient randomisés pour recevoir soit des conseils habituels par le médecin assurant la visite à 30 mois d’âge corrigé, soit un programme de guidance parentale orthophonique par un.e orthophoniste formé.e pour l’étude, comportant 15 séances. Ce programme associe la présentation aux parents de différentes attitudes et techniques visant à soutenir le développement du langage chez leur enfant. Ces attitudes et techniques sont mises en œuvre au travers de situations de jeu de la vie quotidienne. La vidéo utilisant une tablette est utilisée pour permettre durant les séances une rétroaction vers les parents, insistant sur les points positifs. Le partage autour de livres pour enfants et de comptines est encouragé. Enfin, la stimulation focalisée permet  l’apprentissage par l’enfant de quelques mots par semaine.

Plusieurs difficultés ont été rencontrées lors de la mise en œuvre de cet essai, notamment pour le recrutement des familles (manque de temps pour proposer l’étude, éloignement géographique…). Ainsi, le recrutement initialement prévu n’a pas pu être atteint malgré une prolongation de l’étude. La base de données pour analyse statistique est en cours de vérification.

 

Retours d’expériences de terrain 

Lise Da Costa, Orthophoniste en service de néonatologie, Hôpital de Port-Royal, Assistance Publique – Hôpitaux de Paris

Résumé :

La communication portera sur la présentation de ce qui est proposé dans le service de néonatalogie de l’hôpital Port Royal à Paris pour soutenir, accompagner puis surveiller le développement langagier des extrêmes prématurés, suivant deux axes : durant l'hospitalisation, après l'hospitalisation en présentant le calendrier de suivi longitudinal des nouveau-nés les plus fragiles.

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